logo journal nord-info
icon journal
Abandonnés dans l’océan pendant une heure et demie

Abandonnés dans l’océan pendant une heure et demie

Publié le 27/03/2009

Lorsqu’ils prennent place dans l’embarcation les menant vers l’île Tulum, au Mexique, pour un dîner sur la plage en compagnie des autres passagers, Soraya Alem et André Paquin, deux Blainvillois âgés de 28 et 39 ans, ne vont pas tarder à plonger dans l’horreur la plus totale.

Pilotée par un matelot trentenaire, la chaloupe tente tant bien que mal de résister aux assauts des vagues impétueuses qui ne cessent de la frapper. Les vacanciers sont conscients de la gravité de la situation, car le batelier, le visage crispé, doit littéralement surfer sur les lames pour se maintenir à flot.
«Tout à coup, quelqu’un lui a crié: il y a une grosse vague! Il s’est retourné vers la vague qui arrivait vers nous puis a crié à tout le monde: jump! (sautez!)», raconte Soraya.

Sans résistance, tous les passagers sautent à l’eau. De là, ils voient arriver cette vague, immense, qui soulève la chaloupe pour la faire chavirer d’un coup. Les minutes qui suivent relèvent d’une lutte de tous et chacun pour leur survie. Après s’être heurtée la tête, Soraya tourbillonne dans l’eau pendant plusieurs minutes avant d’arriver à reprendre le contrôle. Elle voit l’adolescent qui cherche sa mère désespérément et ne la trouve pas.

Reprenant son souffle, Soraya se dirige vers l’embarcation et s’agrippe à celle-ci lorsque le déclic se fait dans sa tête; la mère de l’adolescent doit se trouver sous le bateau. «J’avais très peur d’aller sous la chaloupe, je n’osais pas…», avoue-t-elle.

Cherchant André des yeux, elle le repère à quelques mètres d’elle et tous les deux se rapprochent l’un de l’autre. Le matelot fait signe aux passagers d’aller vers la plage, de nager vers elle. Ils sont à 10, voire 15 kilomètres du rivage dans une mer agitée avec des vagues qui atteignent les 10 à 15 pieds.
«Nous nous sommes dit que quelqu’un allait nous chercher, que quelqu’un nous avait vu chavirer…», se remémore Soraya. En état de choc par ce qui vient d’arriver, Soraya et André parlent peu.
«J’ai beaucoup discuté avec le bon Dieu…», avance André. «Pour ma part, je ne voulais pas trop discuter de peur de perdre le contrôle. Je pensais aux requins, j’étais terrifiée… Je me suis dit que si l’un de nous deux devait mourir, c’était moi, car mon chum a deux jeunes enfants… Quand on est comme ça en plein milieu de l’océan, perdus, on se dit que nos petits bobos dans notre vie personnelle ne valent plus grand-chose… Je me voyais dans une boîte de bois (cercueil) rapatriée vers le Québec», indique Soraya.

Pendant une heure et demie, les huit survivants sont laissés à eux-mêmes, se laissant porter par les vagues. Soraya voit cette mère de famille près d’elle qui doit plonger son bras à plusieurs reprises pour retenir son enfant aspiré par les vagues de fond…
«Puis l’eau a changé brusquement d’aspect; elle est devenue tout à coup très chaude. On devenait des espèces de croquettes vivantes pour les requins…», continue André.

Une scène rappelant étrangement le film Océan noir où un couple est laissé pour compte au beau milieu de l’océan.

Après une heure et demie à errer dans l’eau, les miraculés voient une chaloupe apparaître brusquement à leur côté.
«Jusqu’à la dernière minute, avant d’embarquer dans le bateau, j’ai eu très peur de me faire attaquer par un requin», confie la jeune femme.

C’est en mettant le pied sur la plage que Soraya craque. Elle devient hystérique, pique des crises et se met à pleurer.

Rencontré le mercredi 25 mars, dans sa demeure de Blainville, le couple jongle avec de nombreuses questions qui demeurent sans réponse. En attente d’un appel de l’agence de voyages, résolument muette au moment de mettre sous presse, qui leur a vendu cette expédition, ils se questionnent maintenant sur l’aspect sécuritaire de ces excursions vendues aux touristes. Quant au comportement étrange du capitaine de ne pas s’informer des huit touristes manquants à l’appel, les justificatifs sont inexistants.

Photo horizontale A: MC_2009_03_26_7927