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Tordu et tordant

(Photo Pierre Latour)

Tordu et tordant

Publié le 10/07/2009

Récession, coupures budgétaires, utilisation douteuse des fonds publics, manque de subventions dans le domaine des arts… Trop familier et un peu déprimant? Que nenni! Les productions Utopia Théâtre semblent avoir trouvé le moyen de percer les nuages de l’actuelle grisaille économique avec Petit Tusse est pas pire fin, mais ya toujours ben des maudites limites!

Seulement avec son titre, la pièce présentée jusqu’au 23 juillet, à la salle Antony-Lessard de Saint-Jérôme, promet déjà rires et délires malgré son sujet peu réjouissant. Et c’est une quête qui atteint son objectif, soulignant au crayon gras les travers de la gestion économique dans une comédie satirique à saveur médiévale, peuplée de personnages plus loufoques les uns que les autres.
À la mort de son père l’empereur, Petit Tusse se voit hériter d’un royaume au bord de la faillite. Dépassé par les évènements et abusé par un conseiller véreux, il devra entreprendre une quête périlleuse. À la recherche de «précieux argent», son chemin sera bien évidemment parsemé d’embûches et de surprises…

L’auteur et metteur en scène Mathieu Handfield a manifestement laissé libre cours à son imagination, truffant son récit d’anachronismes et de digressions. Sans se prendre au sérieux, il trace un portrait critique de la crise économique actuelle en la transposant dans un Moyen Âge aux airs de rêve absurde. Évoluent dans cet univers sans contraintes le peu loquace Petit Tusse (Anne Trudel) et le ridicule chevalier Steven (Guillaume Saint-Amand), un cheval très sage et plutôt étonnant (David Lafantaisie et Philippe Charbonneau), ainsi qu’une dizaine d’ennemis et d’alliés, qui ont conscience de faire partie d’un spectacle, le rappelant au public, interpellant les manipulateurs de consoles, argumentant avec le technicien bourru interprété par Philippe Charbonneau.

Rythmée et punchée, la quête de Petit Tusse est divisée en tableaux, chacun d’eux précédés d’un tour de chant. La Valkyrie (Mélanie Laberge) annonce les évènements, les commente, intervient dans l’action pour en augmenter l’impact dramatique. Voleurs de grand chemin, traversée d’un ravin sans fond, face à face avec un ogre, le chemin est difficile pour le jeune homme, mais même le public n’est pas à l’abri des aléas du parcours de Petit Tusse… Apprenant à s’accepter tel qu’il est et à prendre sa place, ce dernier finira par triompher de l’adversité dans une conclusion des plus surprenantes.

Porté par une troupe de comédiens qui semblent s’en donner à cœur joie, Petit Tusse est pas pire fin, mais ya toujours ben des maudites limites! est un divertissement souvent hilarant, et intelligent sans être prétentieux. C’est un conte actuel, malgré son emballage médiéval, sur l’essai, l’échec et la confiance en ses propres moyens. Et si l’on rit beaucoup des déboires du jeune empereur, on lui accorde sans réserve toute notre sympathie, car on a tous, un jour ou l’autre, été un Petit Tusse essayant de trouver sa place au soleil.