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Drôlement intelligent

Drôlement intelligent

Publié le 27/03/2009

C’était soir d’élections, le samedi 21 mars à l’église Sacré-Cœur. En effet, le metteur en scène Jean-Guy Legault et le Théâtre du Vaisseau d’or conviaient le public térésien à une «vraie fausse course à la chefferie» dans un Théâtre Extrême ludique, humain et interactif…

Nouvellement constitué, le Parti populaire du Québec est sans chef. Chacun de ses membres (Delphine Bienvenue, Marie-Lou Bujold, Vincent Côté, Jean-Marc Dalphond, Nancy Gauthier, Thomas Perreault, Raphaël Roussel et Maude Laurendeau) aspire à cette consécration. Mais, sous l’égide du maître de jeu Antoine Vézina, c’est le public qui aura le dernier mot. Ce dernier a effectivement le pouvoir d’éliminer un à un les candidats de la course et, par le fait même, du spectacle. à la suite de ce scrutin pas très secret, l’on doit assumer les conséquences de son choix, ou subir celui des autres, dans cette métaphore plutôt réaliste de la société démocratique. On se retrouve également devant le dilemme suivant: sauver le meilleur prétendant à la chefferie ou celui qui donnera le meilleur spectacle?

Ainsi, huit candidats aux personnalités typées se mesurent les uns aux autres, dans différentes mises en situation, permettant aux citoyens-spectateurs de faire leur choix chaque tour de vote. Le politicien d’expérience qui connaît tous les rouages, l’actrice émotive et un peu gourde, le sociable sorti plus fort des épreuves de la vie, la femme de tête franche et directe, l’amoureux des États-Unis, la fille du peuple, la jeune idéaliste et le dur au cœur tendre, ils sont tous là, interprétés avec brio par la joyeuse bande du Vaisseau d’or.

Que ce soit lors d’une réunion de planification de campagne, d’un cocktail ou à l’Assemblée nationale, chaque simulation révèle les bons et les mauvais côtés de chaque personnage, leurs personnalités se précisant de plus en plus, leur argumentation reflétant leurs convictions profondes. Certains tableaux montrent les candidats sous un jour plus personnel, voire vulnérable. Quelques candidats s’y attirent des votes de sympathie (tel Thomas Perreault et son numéro de air guitar en sous-vêtements) alors que d’autres pourraient courir à leur perte (Raphaël Roussel et sa morale douteuse).

Et si l’on croit avoir tout prévu, il arrive que l’on se trompe royalement, car le vote appartient au public et ses choix se révèlent parfois surprenants. Le cas échéant, l’habile chef du Congrès Antoine Vézina ne se gêne pas pour partager ses commentaires. De la même façon, si la plupart des candidats évincés se retirent avec dignité et humilité, on se souviendra de Vincent Côté qui, «étouffé par la honte», est copieusement hué par un public qu’il qualifie de crétin, mais on retiendra surtout la sortie digne de ce nom d’un Jean-Marc Dalphond qui quitte la salle avec fracas après sa défaite.

Théâtre Extrême, une pièce rafraîchissante à la formule des plus originale, est un véritable tour de force d’écriture et de jeu: le déroulement et l’issue de l’élection dépendent entièrement des votes du public et, mis à part le débat final (constitué de questions du public), rien n’est laissé à l’improvisation. Le contenu politique du texte demeure accessible aux profanes et l’humour est partie intégrante du spectacle tout au long de ces trois heures de cette enlevante «vraie fausse course à la chefferie»… qui gagnerait sûrement à être un peu raccourcie.