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Stéphanie B. Dumont (Madame Doudkina), Arnaud Vincent-Raschella (Mioussov), dans une scène de Je veux voir Mioussov! (Photo Yves Déry)

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La toute dévouée Vera Karpovana (Sarah Leblanc-Gosselin), aux petits soins avec la «célèbre» Klava Igniatiouk (Camille Walsh). (Photo Yves Déry)

Théâtre: la quête affolante du rien

Publié le 22/03/2017

Tant de chichi pour quelques litres de peinture? En tout cas, c’était bien suffisant pour tenir sur une scène pendant presque deux heures et divertir un public qui s’est bien amusé de cette quête affolante du rien qu’on lui proposait avec Je veux voir Mioussov!, ces derniers jours, dans les officines de l’Option-Théâtre du collège Lionel-Groulx.

Le décor qui nous attendait au studio Charles-Valois, austère, tout en hauteur, d’un blanc aseptisé et presque vide (tout juste si on y apercevait deux chaises et une horloge, sans compter l’imposante fenestration dominant ce lieu clos et oppressant), semblait se préparer davantage à accueillir une tragédie, ce dont nous n’étions pas très loin, en fait, puisque rien ne se déroulerait comme prévu et prendrait une ampleur insoupçonnée.

Un vaudeville sans portes

Sous la plume de Valentin Kataïev (1897-1986), un auteur qui s’est bâti une jolie carrière en se moquant juste assez, mais pas trop, des travers de la société russe, nous plongerions plutôt dans un véritable vaudeville sans portes, quand un certain Zaïtsev, en fonctionnaire zélé, userait d’un subterfuge plus ou moins habile afin de franchir la barrière bureaucratique le séparant du camarade Mioussov, venu s’installer dans une maison de repos tenue par une directrice totalement dévouée à sa clientèle, aussi bien que son personnel y est aveuglément dédié. Dans cette maison, tout est impeccable et la clientèle se détend en prenant des bains à l’huile de pin, loin des tracas et des aléas de la vie.

L’entêtement de Zaïtsev (qui se donne un mal de chien afin que Mioussov lui signe un bon de livraison de peinture) vient toutefois bousculer l’ordre établi, si bien que chacun en vient à confondre le vrai et le faux, se croit cocu ou prétend qu’on veut l’assassiner, les scènes de rupture brutales succèdent aux déclarations d’amour exaltées, bref, le moindre personnage devient la possible étincelle qui pourrait tout faire exploser en tenant pour acquis ce que suggèrent obstinément les apparences.

Des personnages ridicules

Dans cette maison de fous, la metteure en scène Alice Ronfard a fait cohabiter des personnages en contrepoids, dont les têtes d’affiche, comme Mioussov (Arnaud Vincent-Raschella) et Zaïtsev (Félix Emmanuel), par exemple, affectent une posture et un ton quasi réalistes, pendant qu’autour deux s’agitent une galerie d’énergumènes aussi délicieusement ridicules que cette Madame Doudkina (Stéphanie B. Dumont) qui, spasmes de tragédienne à l’appui, se prétend la maîtresse de Mioussov, ou encore ce Docteur Kirilof (Marie Maude Boisclair) qui prescrit les électrochocs avec le même empressement que les médecins de Molière administrent les saignées.

Chacun loge aux extrémités du spectre ou dans l’un ou l’autre de ses rayonnements (gestuelle amplifiée, costumes extravagants, défauts de langage), dans une séquence d’événements loufoques au terme de laquelle tout finit évidemment par s’arranger, le tout baignant dans une riche trame musicale continue, cet aspect des choses et cette préoccupation étant résolument caractéristiques des productions dirigées par Mme Ronfard.

Notez bien qu’une représentation était encore à l’affiche, ce mercredi 22 mars à 19 h 30. Billetterie: 450 434-4006.