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Marius et Fanny: l’histoire universelle d’un amour raté

Marius et Fanny prendra l’affiche du TLG

Marius et Fanny: l’histoire universelle d’un amour raté

Publié le 04/02/2014

Nous aurions plus d’un lien de parenté avec la célèbre Trilogie marseillaise de Marcel Pagnol. D’abord pour l’universalité du propos (l’amour, le goût du voyage, la nostalgie du retour), mais aussi, estime le metteur en scène Normand Chouinard, parce que cette histoire drôle et émouvante pourrait tout aussi bien se passer chez nous... à une certaine époque, bien sûr, l’appel de la forêt suppléant celui de la mer.

C’est d’abord l’histoire d’un amour naissant. Nous sommes à Marseille, en 1920, et le jeune Marius est tiraillé entre deux passions: la belle Fanny et cet irrésistible attrait pour la mer, l’aventure, les voyages. Poussé par Fanny (éplorée, mais persuadée qu’elle ne pourra jamais rivaliser avec le séduisant élément), Marius s’embarque et disparaît derrière la ligne d’horizon.

Dans son sillage, un drame se noue: Fanny est enceinte et, conventions de l’époque obligent, elle doit se résoudre à épouser Panis, un homme beaucoup plus âgé qu’elle. Mais rangez vos mouchoirs puisque Marius et Fanny, malgré son indéniable fond de tristesse, procure davantage de bonheur que de mélancolie, tant les personnages qui y défilent sont savoureux.

La pièce, produite au Théâtre du Rideau Vert, l’an dernier, a depuis lors amorcé une tournée qui s’arrêtera au Théâtre Lionel-Groulx, les 28 février et 1er mars. Autour de Rémy Girard, qui y incarne César (le père de Marius), Normand Chouinard a réuni une distribution qui aligne les François-Xavier Dufour et Marie-Pier Labrecque, dans les rôles-titres, Manuel Tadros, Sophie Faucher, Danielle Lorrain, Jean Marchand, Frédéric Desager, Julien Hurteau et Denis Harvey.

Tous ont dû faire l’apprentissage de l’accent marseillais (comme on s’initie à un instrument de musique), un exercice incontournable, selon le metteur en scène qui croit fermement que cette pièce souffrirait mal le moindre effort d’adaptation. D’ailleurs, en général (pour ne pas dire fondamentalement), Normand Chouinard n’est pas un partisan des relectures, lui qui penche plutôt vers une autre approche, celle de «redonner l’œuvre dans sa plénitude originelle».

«Mon souci est de rendre justice à l’œuvre, telle qu’elle a été créée au départ. Pourquoi proposer une deuxième ou une troisième lecture, quand la majorité des gens n’ont pas eu accès à la première?» questionne-t-il. Voilà qui n’exclut pas, cependant, qu’on puisse aborder la chose avec une attitude contemporaine.

«Évidemment, le rythme est beaucoup plus resserré qu’à l’époque, dit‑il. Il y a aussi cette façon dont les jeunes amoureux se regardent. Dans les années 1930, on avait tendance à étirer le sentiment, alors qu’on est plus direct, aujourd’hui.»

Dès le départ, Normand Chouinard a demandé à sa troupe de s’appliquer à raconter une histoire simple, d’y incarner des personnages aux prises avec les problèmes du quotidien, apparemment sûrs d’eux, qui afficheraient l’air heureux de ceux qui peinent à exprimer leurs véritables émotions. Outre l’universalité du propos, la couleur des personnages, selon le metteur en scène, demeure l’une des principales qualités de la pièce. «On y sent tout l’amour de l’auteur pour les gens de son pays», note‑t‑il.

Anecdote: c’est alors qu’il se trouvait à Paris, pris de nostalgie, que Pagnol a eu l’idée, vers 1925, de sa Trilogie marseillaise (qui inclut également César). On a d’abord voulu le dissuader de faire parler ses personnages dans la langue provençale, en plaidant que ça ne sortirait jamais de Marseille ou pire, que ça ressemblerait à un travail d’amateur. Pagnol, qui avait momentanément plié, s’était finalement convaincu «qu’une œuvre locale, mais profondément sincère et authentique, pouvait parfois prendre place dans le patrimoine littéraire d’un pays et plaire dans le monde entier», une citation qu’on pourrait tout aussi bien attribuer à un certain Michel Tremblay.

Une autre bonne raison de voir cette pièce? Rémy Girard qui, selon le metteur en scène, y tient l’un de ses plus grands rôles au théâtre, ce qui n’est pas peu dire, quand on sait que Normand Chouinard, pour lui avoir talentueusement donné la réplique à moult reprises, en connaît tout un pan sur le sujet.

A-t-il eu, à certains moments, l’envie de sauter sur la glace? «À plusieurs reprises, il est arrivé, après les répétitions, que je me prenne un accent marseillais pour donner mes notes. Tous les acteurs ont eu la gentillesse de jouer le jeu», raconte‑t‑il. Ce genre d’atmosphère.