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Marie Chouinard: la forêt enchantée

Marie Chouinard: la forêt enchantée

Publié le 03/03/2014

Odyscène a accueilli de la belle et grande visite, le 22 février dernier. En effet, pour la toute première fois, la Compagnie Marie Chouinard s’est produite sur les planches du théâtre Lionel-Groulx.

Le public, particulièrement nombreux pour assister à cette soirée unique, a ainsi pu voir ou revoir deux pièces de la chorégraphe de renommée internationale. Pas de nouvelle création au menu, mais deux pièces de son répertoire soigneusement choisies, à savoir Les 24 préludes de Chopin, suivie du Sacre du printemps.

Avant la représentation, Frédéric Lapierre a brièvement introduit l’œuvre et l’artiste, reprenant les paroles de Marie Chouinard pour rassurer les profanes et néophytes qui craindraient peut-être de ne pas tout comprendre. Celle-ci aurait déjà dit se sentir «comme une petite fille sur la Terre, à essayer de faire de la beauté». «Ce spectacle, c’est peut-être aussi simple que ça», de commenter M. Lapierre avant de s’effacer, laissant le plateau aux interprètes pour les 24 préludes.

Les danseurs sont déjà en place au lever du rideau, leurs corps définis et soulignés par la lumière, dansant sur le silence. Ils s’apparentent à des sculptures mouvantes, aux gestes délicats ou amples évoquant les danses rituelles des oiseaux qui se courtisent.

Ces 24 préludes proposent solos, duos, trios et mouvements de groupe, oscillant entre l’urgence et l’émoi, la douceur et la colère, le désespoir et la détermination. La chorégraphe joue avec la musique et sa structure, explore en mouvements les différentes rythmiques et émotions évoquées par celle-ci.

La gestuelle se fait ici angulaire et saccadée, sautillante, tiraillée entre équilibre et tension; ailleurs elle devient ample et ondulante, près du sol, dramatique et douce. Par des mains liées, de tout petits pas et minuscules mouvements des doigts, des plus légères inclinaisons, l’œuvre est empreinte d’une subtilité qui émeut, mais se teinte aussi parfois d’une couleur ludique, plus légère.

Une toute autre atmosphère émane de la seconde pièce, Le sacre du printemps. À l’image d’une mystérieuse et exotique forêt enchantée, elle regorge de créatures étranges, de plantes grimpantes, d’oiseaux fantastiques. Il y a beaucoup à voir dans cette foisonnante explosion de son et de mouvement. Prédateurs et proies, rivaux, amants se pourchassent, s’affrontent, se conquièrent dans une sorte de surplace effréné. Les corps prennent des angles inhabituels, les lignes sont brisées, les silhouettes sont désarticulées, révélés ou dissimulés par un éclairage judicieux.

Captivant et stimulant, fascinant, ce Sacre du printemps garde le spectateur en haleine à la manière d’un suspense, l’émerveille avec ses créatures cornues dignes d’un conte, l’étourdit par son mouvement constant et complexe, mais surtout, l’enchante par sa beauté. Frédéric Lapierre avait donc raison, c’était aussi simple que ça.