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François Bellefeuille: le fou furieusement drôle

Hirsute et irrité

François Bellefeuille: le fou furieusement drôle

Publié le 04/04/2014

Une salle archipleine au Théâtre Lionel-Groulx, remplie d’un public fébrile et enthousiaste, rien de moins pour accueillir l’humoriste François Bellefeuille et son premier spectacle solo, le 29 mars dernier.

L’inimitable ex‑vétérinaire, hirsute et irrité, a su faire crouler de rire l’assistance par ses propos inusités et sa logique bien à lui. Il était précédé sur scène par le sympathique Pierre‑Luc Pomerleau, qui a brillamment tiré son épingle du jeu avant de céder le micro à l’échevelée tête d’affiche.

En effet, Pomerleau entre en scène, applaudi chaleureusement par un public de bonne humeur et accueillant. «Si vous pensez m’avoir déjà vu quelque part, c’est peut‑être chez RONA!» déclare‑t‑il d’emblée avec autodérision. Son tour de piste se déroule avec fluidité, l’humoriste faisant l’analyse des changements inhérents à sa trentaine récente. Seul de son entourage à ne pas avoir d’enfants, il admet parfois se sentir «rejet», mais «c’est pas grave, j’aime ça avoir de l’argent et du temps libre», conclut‑il. Pomerleau fait donc état des diverses métamorphoses observées dans sa vie sociale, particulièrement dans les discussions avec ses amis. Il établit également un parallèle inédit entre camping et accouchement, avant de se déclarer «l’abruti» dans son couple. Mais comme il dit, sa blonde aurait pu tomber sur pire, exemples à l’appui, car «les épais sont durs à spotter, ils s’habillent comme nous autres»! Pierre‑Luc Pomerleau termine sa prestation en évoquant une mésaventure arrivée à l’urgence, salué par un public ayant apprécié son aisance et ses bonnes idées.

François Bellefeuille, dont la seule voix hors champ déclenche des tonnerres d’applaudissements, fait son entrée en scène devant un cadre lumineux entourant un écran sur lequel apparaissent des dessins faits à la main; ces derniers se transformeront tout au long du spectacle pour appuyer les propos de l’humoriste.

Les spectateurs sont déjà hilares, juste à apercevoir sa dégaine particulière, s’esclaffent de plus belle dès qu’il ouvre la bouche: «Est‑ce qu’il y en a qui sont venus en BIXI?» Le ton, absurde au possible, est ainsi donné d’entrée de jeu. Mais attention, François Bellefeuille, par la bouche de son irascible personnage, ne dit pas du tout n’importe quoi.

Certes, il a une structure de pensée qui lui est propre et défie souvent toute rationalité, mais les liens de cause à effet qu’il établit sont indiscutables. Qu’on l’écoute décrire à un enfant comment on fait les bébés, expliquer la sournoiserie du café, analyser la vie amoureuse du fou de Bassan ou encore les causes de son infertilité en termes très techniques, on ne peut qu’apprécier le côté recherché, rafraîchissant et inattendu de son point de vue.

L’effet de surprise génère à tout coup l’hilarité, tout autant que ses éclats de colère habilement dosés, de même qu’une solide dose d’une autodérision désespérée. Coup de cœur pour deux numéros inédits: celui où Bellefeuille pose son regard à la fois loufoque et lucide sur la littérature enfantine, en décortiquant deux livres image par image, puis celui où il refait littéralement le monde, coupant et collant pays et continents, encore une fois selon une logique toute personnelle! Mais on ne peut qu’y adhérer, et avec joie.