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Cowboys salutaires

(Photo Pierre Latour)

Cowboys salutaires

Publié le 05/03/2010

En dépit de leur succès, il est légitime de s’interroger sur la profondeur, le réel degré de subtilité de ce que les Cowboys Fringants apportent au milieu musical. Mais il est forcé d’admettre qu’en spectacle, ils créent l’évènement. Ils sont définitivement dans leur élément. Et leurs adeptes aussi!

C’est connu, les gars des Cowboys Fringants, pour la plupart, sont des mordus de hockey. Les exploits des héros de notre sport national les font littéralement lever de leur siège. Leur tour de force à eux, c’est qu’ils réussissent à garder leur public debout du début à la fin de leur performance, comme ce fut le cas le samedi 27 février au Théâtre Lionel-Groulx.

Fidèles à leurs habitudes, les Cowboys Fringants ont suscité le délire à peine montés sur la scène. Et c’est resté comme ça pendant tout près de deux heures. On se serait cru à un spectacle de la Fête nationale sans l’éclat du feu de camp et les flots de houblon.

D’ailleurs, il est plutôt inhabituel pour le Théâtre Lionel-Groulx de faire preuve d’autant de souplesse en permettant aux gens de rester debout tout près de la scène et un peu partout dans les allées. Rituel fringant oblige. On a laissé l’assistance se mouvoir librement et énergiquement au rythme néo-trad des têtes d’affiche de la soirée.

Les Cowboys Fringants attirent généralement un public composé en majorité de jeunes à la fibre nationaliste, voire nationaleuse, et à l’épiderme assez vert, sauf quelques rares exceptions observables. Des représentants d’une génération qui gardent un regard critique sur les agissements et les décisions des générations qui les précèdent et qui est fortement conscientisée à la sauvegarde de la planète. Les Cowboys Fringants versent incidemment un dollar par billet vendu à leur propre fondation vouée à la protection des habitats naturels et des espèces fauniques et floristiques menacées.

Les Cowboys Fringants offrent aux jeunes des textes qui leur permettent de déverser leur fiel sans trop de grandes conséquences. Y-avait-il d’ailleurs une chanson que l’auditoire ne connaissait pas par cœur? Pas une seule!

Touche féminine

Les Cowboys Fringants, c’est aussi une cowgirl. Marie-Annick Lépine compte pour beaucoup dans l’effet d’entraînement que provoque cette bande de bambocheurs. Variant avec un doigté magique le violon, l’accordéon et la mandoline, elle vient parfois ajouter une touche de sensibilité à un air endiablé, ce qui ne diminue en rien sa vitalité contagieuse tout comme celle de ses comparses.

Cependant, bien qu’on puisse leur accorder du talent pour faire lever une salle, ils ne se sont certes pas aussi doués pour réussir à convaincre les amoureux de la langue et amateurs de sensations musicales fortes qu’ils sont de la trempe de Polémil Bazar, par exemple. Le dynamisme dégagé est semblable, mais la qualité musicale et le raffinement des textes ne s’y apparentent pas. On sent par contre des efforts dans cette direction comme dans l’interprétation très sentie et les arrangements plus sophistiqués de l’apocalyptique pièce Plus Rien, inspirée par les propos de l’astrophysicien Hubert Reeves.

Deux heures de cette musique, disons-le, trop souvent tonitruante, et mes oreilles ont réclamé une pause dans un endroit paisible. Signe d’un coup de vieux? Mon ouverture spontanée à d’innombrables horizons musicaux m’empêche de le croire.