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Béatrice Picard: Carpe Diem

Béatrice Picard

Béatrice Picard: Carpe Diem

Publié le 03/11/2014

Certaines vies sont de longs fleuves tranquilles, d’autres se composent de mille cours d’eau aux multiples affluents. Ces dernières font d’excellents films, mais sont encore plus passionnantes lorsque racontées par leur protagoniste.

C’est ce que propose la série Rencontres de la création, animée par Frédéric Lapierre, à la bibliothèque de Sainte-Thérèse. Des légendes de la colonie artistique québécoise y sont déjà passées, par exemple Edgar Fruitier, Marcel Sabourin ou Pierrette Robitaille, pour une petite heure de contact privilégié. Le mardi 28 octobre, c’est une Béatrice Picard volubile et généreuse qu’ont pu rencontrer les spectateurs et lui poser quelques questions à la suite d’une entrevue habilement menée et documentée par le maître de cérémonie.

Comme à son habitude, ce dernier teinte d’humour la présentation de son invitée de marque. Il la prétend dommageable pour l’environnement, car l’impression de son curriculum vitæ nécessite pas moins de 34 pages pour contenir les 114 pièces de théâtre et 99 séries et films à son actif depuis 1958! Celle qui se destinait d’abord à une carrière en droit se tourne vers le jeu, à la suite d’un séjour dans l’Europe de l’après-guerre.

Elle dresse d’ailleurs un parallèle entre les deux professions, car on doit, dans l’une comme dans l’autre, se dédier complètement à sa cause. Ce dévouement, cette fougue, émanent d’ailleurs toujours de Mme Picard, qui semble en faire un mode de vie, une raison d’être. Sa soif d’apprendre est grande, elle qui cumule pourtant 65 années de métier.

Celle qui a joué avec Jean Duceppe, Paul Hébert, Andrée Lachapelle et autres, admet avoir un grand plaisir à être mise au défi en collaborant avec de jeunes acteurs issus des écoles de théâtre. Pour elle, chaque projet doit être abordé comme une nouvelle page et l’artiste doit être ouvert, réceptif à la découverte, à la vision du metteur en scène. «Pour gagner sa vie dans ce métier, il faut tout faire, et sans attendre», dit Béatrice Picard, car même la plus petite occasion en est une d’apprendre et de participer à l’évolution du métier.

À 85 ans, Béatrice Picard aborde la vieillesse avec sérénité. Pleine d’une vitalité qui fait défaut à de bien plus jeunes qu’elle, la comédienne accepte la mort prochaine en vivant comme si jamais elle n’allait mourir. «Demain sera là, et je serai là, avec ce demain», dit-elle avec sagesse. Consciente de sa chance, elle a à cœur le bonheur général des personnes âgées, s’impliquant notamment auprès des Petits frères de pauvres. Elle exhorte également les aînés à prendre leur place, eux qui ont un extraordinaire bagage de sagesse et de philosophie à transmettre. Elle la première.

Mme Picard aime la vie, les gens, et elle éprouve de la difficulté à refuser les propositions, ce qui explique son parcours aux multiples rebondissements: elle fut porte-parole du Salon des chapeaux, en 1997, lectrice à la radio aux côtés de René Lévesque, elle fait la voix de Marge Simpson, depuis 25 ans, sera bientôt de la distribution d’un film de zombies, incarnera une mamma italienne dans Les chroniques de St-Léonard, au Théâtre Lionel-Groulx, le 7 mars prochain…

Béatrice Picard, si elle ne sait pas dire non, est entièrement présente lorsqu’elle se lance dans l’un de ses mille projets, toute au moment présent, et cette Rencontre de la création ne fait pas exception à la règle.