logo journal nord-info
icon journal
«On est en vie jusqu’à la mort» – Dre Lucie Lauzon

(Photo Michel Chartrand)

«On est en vie jusqu’à la mort» – Dre Lucie Lauzon

Publié le 21/09/2010

Ils sont quatre médecins à s’occuper de l’unité de soins palliatifs au centre Drapeau-Deschambault, dont Lucie Lauzon, un médecin pétant de vie qui a accepté de répondre à quelques questions entourant l’euthanasie.

D’entrée de jeu, il faut savoir que le cycle de présence est relativement court dans les soins palliatifs du CHSLD Drapeau-Deschambault, puisqu’il s’échelonne sur une période de trois mois et moins. Néanmoins, les malades gravement atteints (mais toujours vivants) arrivent au CHSLD… rassurés.

«Lorsque les patients se présentent ici, ils vivent un peu une lune de miel. L’insécurité du domicile ou la peur de mourir à la maison sont balayées par un sentiment de quiétude qu’apportent les soins palliatifs. C’est en quelque sorte un hôpital pour eux. On voit même une sorte d’accalmie se produire dans leur état de santé», raconte la Dre Lucie Lauzon en souriant. «Mais, il ne faut pas se leurrer, car la maladie continue son chemin», de continuer cette dernière.

Souffrance morale

Si l’angoisse est reliée à la maladie et ses douleurs et semble faire l’unanimité chez le commun des mortels, puisqu’elle est génératrice de peur, elle ne peut trouver son apaisement que par une assistance médicale soutenue et reconnue. «Quand on est soulagé, on vit mieux», rappelle le médecin.

Alors, pourquoi l’euthanasie? Est-elle une avenue obligée? «Il n’y a pas tant de demandes que ça. La souffrance psychologique est parfois telle que l’euthanasie semble être la solution. Pourtant, on peut y remédier par des services offerts aux patients. Et en apportant du soutien, le patient ne veut plus mourir. En fait, il ne désirait pas mourir au préalable, il souhaitait mettre fin à sa douleur morale. N’oublions pas qu’on est en vie jusqu’à la mort.»

Parce que les souffrances psychologiques sont sérieuses, l’envie d’en finir peut être forte pour une infime minorité de gens (2 %). Toutefois, il n’est pas rare de voir ces mêmes personnes faire volte-face en cours de route. «On prend le temps d’expliquer à nos patients le pourquoi de la médication et comment elle va les aider et les assister.»

Si l’on sait d’ores et déjà que la maladie frappe sans pitié à tous les âges, tous les sexes et toutes les conditions, Dre Lauzon note certaines inégalités.

«Mourir à 36 ans en sachant que l’on ne verra pas grandir ses enfants ou que l’on n’a pas encore réalisé des choses que l’on voudrait faire est très difficile, voire enrageant. On ne capitule pas devant la mort quand on est jeune», dit-elle.

Se disant très perplexe face à la question de l’euthanasie, Dre Lauzon observe des disparités notables entre les maladies neurologiques, débilitantes ou évolutives. «Les gens veulent davantage vivre que mourir, et ce, même avec des conditions de vie plus difficiles, ils ne veulent pas partir. Peu autonomes, ils préfèrent, et de loin, voir leurs enfants et leurs petits-enfants», soutient Lucie Lauzon.

«En fin de vie, les patients dorment beaucoup, et cela, 10 à 12 jours avant leur mort. Et ce sont les familles qui en souffrent le plus. Physiquement, psychologiquement, émotionnellement, les derniers moments sont durs. Même si elles nous demandent d’écourter ce passage (NDLR: les familles), nous ne faisons rien de tel», soutient Lucie Lauzon.

Sachant profiter de chaque petit moment de la vie, l’unité de soins palliatifs introduit de petites activités légères et délicates à ses patients. Suggérant le précepte médical voulant que l’on n’est pas mort tant que l’on respire, on a appris à bien profiter du moment présent en y participant tout simplement.