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L’étrange et prolifique destin de l’étourneau

L’étrange et prolifique destin de l’étourneau

Publié le 05/04/2013

Collaboration spéciale

Aimé par les uns, honni par les autres, l’étourneau réside parmi nous à longueur d’année, qu’on le veuille ou non.

L’étourneau sansonnet, de son vrai nom, présente deux parures au cours d’une année. Au printemps et en été, il revêt un costume irisé sur la plus grande partie de son corps, à l’exception d’un bec jaune. En automne et en hiver, il affiche une poitrine mouchetée, un dos brunâtre et un bec grisâtre.

Oiseau omnivore («se nourrissant d’aliments divers», Larousse), l’étourneau joue un rôle utile en mangeant des larves, chenilles et autres insectes en quantité innombrable, au printemps et en été.

Par contre, l’oiseau est carrément nuisible à la fin de l’été et en automne en dévastant des plantations d’arbres fruitiers, de céréales et de vigne, en grandes bandes de milliers d’individus. De plus, les fientes de ces bandes provoquent beaucoup de désagréments dans les villes et les banlieues.

Incapable d’excaver une cavité, l’étourneau sansonnet profite de la moindre ouverture pour y faire son nid. Il établit souvent son nid dans une cavité d’arbre, mais il peut s’installer un peu partout: anfractuosités des bâtiments urbains et ruraux, poteaux électriques, boîtes aux lettres, etc.

En concurrence avec les autres espèces d’oiseaux pour obtenir des sites de nidification, l’étourneau gagne souvent la bataille au détriment des hirondelles, des pics, du merlebleu de l’Est et autres espèces ailées.

Cet oiseau opportuniste n’a pas demandé à vivre ici en terre d’Amérique. Emprisonnés dans des cages, quelques groupes d’étourneaux ont été transportés par bateau, de l’Europe aux États-Unis.

L’univers de Shakespeare

Au plan historique, le destin de l’étourneau en Amérique relève d’une idée pour le moins originale de la part d’Eugene Shieffelin, un habitant du Bronx et membre de l’American Acclimatization Society, un groupe voué à l’échange des plantes et des animaux entre les différentes parties de la planète. Il va sans dire que les notions d’écosystème et de protection du milieu naturel local étaient pratiquement inconnues à l’époque.

Celui-ci a tenté d’introduire dans le Nouveau Monde toutes les espèces d’oiseaux mentionnées dans les œuvres de William Shakespeare. Ainsi, il relâche quelque 60 étourneaux, en 1890, dans le Central Park de New York, suivi par un deuxième essai de 40 oiseaux en 1891, au même endroit.

Parmi les autres tentatives, seule l’introduction du moineau domestique a réussi, notamment en raison de l’implication de quelques groupes canadiens et américains.

Aujourd’hui, différentes sources scientifiques estiment que la population globale de l’étourneau oscille entre 200 et 250 millions d’individus en Amérique du Nord. En 123 ans d’existence, l’étourneau a colonisé l’ensemble des États-Unis et du Canada, pour devenir l’espèce la plus abondante de ces territoires.

Dès 1914, l’oiseau est signalé au Canada par une observation aux Chutes Niagara, en Ontario. Au Québec, il est repéré en 1917 à Betchouane, sur la Côte-Nord. Le premier couple nicheur s’installe à Saint-Lambert, en 1922.

Dix ans plus tard, l’espèce étend son aire de nidification dans les régions de Charlevoix et de la Gaspésie.

En 2013, l’étourneau habite toutes les régions de la province, à l’exception de l’extrême nord du Québec.

Journaliste indépendant pour divers magazines et autodidacte dans l’apprentissage de l’ornithologie, Bernard Cloutier est membre de la Société ornithologique de Lanaudière. Il est aussi animateur, guide et conférencier. Pour lui écrire: b.clou@hotmail.com