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Le député Claude Surprenant songe à se présenter de nouveau dans Groulx

Claude Surprenant réfléchit à son avenir politique.

Le député Claude Surprenant songe à se présenter de nouveau dans Groulx

Publié le 27/06/2018

Bien que le 16 mai, le député de Groulx, Claude Surprenant, ait affirmé qu’il n’avait pas l’intention d’être candidat aux élections provinciales d’octobre prochain, les nombreux appuis qu’il a reçus de la population au cours du dernier mois l’ont poussé à réfléchir. Il annonce donc aujourd’hui se donner «jusqu’à la fin de juillet» avant de prendre une décision finale.

«L’appui que la population me manifeste m’étonne et me touche sincèrement. Nombreux m’enjoignent de poursuivre mon travail et que, devant leur désenchantement vis-à-vis des aléas de la partisanerie, ils en sont rendus à considérer davantage l’individu que le parti», affirme M. Surprenant pour expliquer ce volte-face.
Élu une première fois comme député, le 7 avril 2014, «alors que les sondages donnaient 13 % des votes à mon groupe», a-t-il précisé, M. Surprenant avait alors remporté le vote populaire sous la bannière de la CAQ par une majorité de 256 voix sur la libérale Vicki Émard. Sauf que depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. La dernière année et demie n’a en effet pas été de tout repos pour le député de Groulx.
D’abord exclu du caucus de la CAQ, le 24 janvier 2017, afin, disait alors le chef du parti, François Legault, «de faire la lumière sur ses dépenses», M. Surprenant a siégé, depuis, comme indépendant.
Ce n’est que neuf mois plus tard, le 30 novembre 2017, que cette «lumière», comme l’indiquait M. Legault, a finalement été faite. Dans le rapport qu’il a publié, le Commissaire à l’éthique, Me Jacques St-Laurent, blâmait finalement le député, affirmant que celui-ci avait violé le code d’éthique de l’Assemblée nationale en permettant notamment à des employés de son bureau de comté de faire du travail partisan tout en recevant une paye de l’État.
En toute transparence
Dans une entrevue qu’il a accordée au journal, le 13 juin, Claude Surprenant a parlé en toute transparence et vidé son sac. Le député de Groulx a entre autres fait état de cette ex-employée «congédiée pour faute grave», a-t-il dit, précisant en outre que celle-ci avait commis un vol de près de 10 000 $ dans les coffres de la circonscription. Il a d’ailleurs identifié cet événement comme étant à l’origine des allégations à son sujet qui ont suivi.
Bien qu’il avoue avoir erré lorsque, quelques jours après son élection, en 2014, il avait octroyé un contrat de 715$ à sa conjointe architecte qui avait œuvré au déménagement de son bureau de circonscription, de la rue Turgeon vers le boulevard Curé-Labelle, à Sainte-Thérèse, il affirme n’avoir rien d’autre à se reprocher.
«Les autres allégations, dit-il, n’ont pas passé le test, bien que certains médias en aient fait leurs choux gras. J’œuvre, depuis, à protéger ma réputation».
Bouc émissaire?
Dans son rapport d’enquête du 30 novembre 2017, le Commissaire à l’éthique avait recommandé qu’une réprimande soit imposée au député de Groulx pour, écrivait-il, «des manquements au Code en permettant ou en tolérant que les biens et les services fournis par l’État soient utilisés pour des activités qui ne sont pas liées à l’exercice de sa charge». C’est son attaché politique de l’époque, et président de l’aile jeunesse de la CAQ, Yann Gobeil-Nadon, qui l’avait alors dénoncé.
Puisque quelques jours auparavant, Me St-Laurent avait choisi de ne pas blâmer huit autres députés sur les mêmes enjeux de partisanerie, Claude Surprenant a affirmé s’être alors senti comme un «bouc émissaire» et d’être ainsi réprimandé pour tous. Il va même jusqu’à affirmer en Chambre avoir entendu le Commissaire utiliser ces mêmes mots (bouc émissaire) lors d’une rencontre, ce que ce dernier a nié. Mais Claude Surprenant n’en démord pas: Me St-Laurent a bien utilisé ces mots.
«Lors de notre dernière rencontre, le Commissaire a exprimé vouloir faire de moi un cobaye. Souvent pointé du doigt pour n’avoir émis aucune réprimande dans l’ensemble de son mandat de six ans, il a choisi d’en infliger une, dans son tout dernier rapport, le dernier jour de son mandat, m’ayant informé quelques heures auparavant que je serais sa victime», insiste M. Surprenant avant d’ajouter que s’il a choisi de s’exprimer de la sorte aujourd’hui, c’est qu’il en assez «de vouloir protéger l’Institution», comme il le fait depuis un an et demi.
Écoute d’enregistrements
Claude Surprenant fut de nouveau réprimandé, pas plus tard que le 12 juin dernier, par certains de ses collègues de l’Assemblée nationale, tels Agnès Maltais (PQ) et Jean-Marc Fournier (PLQ). Ceux-ci lui reprochaient alors d’avoir mis en doute le rapport du jurisconsulte, embauché pour écouter les enregistrements de ses rencontres avec le Commissaire à l’éthique. L’objectif était alors déterminer si Me St-Laurent avait ou non mentionné le terme «bouc émissaire». Appuyé par son avocat, Claude Surprenant s’est battu pour avoir droit d’écouter ces enregistrements. À leur écoute, il réalise qu’au lieu d’utiliser le terme «bouc émissaire», le Commissaire parlait plutôt de lui comme d’un «cobaye».
«C’est dans le même tiroir selon moi, mais la vérification s’était limitée à ’’bouc émissaire’’. Je ne comprends pas qu’on ne m’ait accordé la possibilité d’écouter les enregistrements avant. On aurait alors parlé du bon terme et cessé de tourner en rond», rage M. Surprenant.

«Faussetés et injustices», clame Claude Surprenant

Claude Surprenant poursuit ses démarches fin de rétablir sa réputation. Le député de Groulx n’a aucunement l’intention de baisser les bras, allant même jusqu’à entreprendre des poursuites judiciaires. S’il agit ainsi, insiste-t-il, «c’est pour le bien de la démocratie».
«C’est décevant, voire essoufflant [d’entreprendre des poursuites], mais je continue à défendre mon intégrité», de dire Claude Surprenant qui estime par ailleurs que le Commissaire «est allé au-delà du mandat qui lui avait été confié» en critiquant, dans le rapport qu’il a publié le 30 novembre 2017, la gestion des remboursements de dépenses de papeterie des employés et en portant des jugements de valeur à son égard.
«Il a émis des commentaires inappropriés, basés sur des allégations et en contradiction des faits», soutient le député de Groulx avant d’ajouter s’être, au contraire, «toujours soucié de ses employés».
«Ils ont toujours été remboursés rapidement, preuves à l’appui. La comptabilité de mon compte de comté contredit d’ailleurs la base de raisonnement du Commissaire, et j’ai donc entrepris une démarche de contrôle judiciaire».
Dans toute cette affaire, ce qui choque encore davantage le député de Groulx, c’est que peu de ses collègues députés se sont levés en Chambre pour le défendre. Il aurait souhaité voir «un leader» se tenir debout et affirmer que de voter en faveur du rapport du Commissaire entraînerait une injustice puisque, dit-il, le document «contenait quelques irrégularités».
Il peut se consoler en se disant qu’Amir Khadir l’a fait: «Excusez-moi, a dit le député de Mercier. On ne fera pas de Claude Surprenant, le député de Groulx, le bouc émissaire d’un problème systémique dont la responsabilité relève de la CAQ, du PQ et du Parti libéral».
Selon M. Surprenant, aucun député n’accepterait d’être traité de la sorte.
«Je ne peux me résoudre à accepter les faussetés et les injustices inscrites à mon rapport. En toute objectivité, aucun des 125 députés en cette Chambre n’accepterait une telle situation injuste. L’Assemblée doit démontrer qu’elle a un souci de justice et qu’elle porte bien haut la protection de la démocratie.»
Pour les bonnes raisons
Claude Surprenant conclut en affirmant être en politique «pour les bonnes raisons», soit de contribuer à l’amélioration de la qualité de vie de ses concitoyens, dans un souci de justice.
«Dans mon album de finissants du secondaire, est inscrit sous ma photo ‘’honneur à la justice et à l’honnêteté’’. Je réitère que ces valeurs sont toujours les miennes».

«Nos élus semblent pouvoir tout dire sans conséquence!»

Yann Gobeil-Nadon était attaché politique du député de Groulx et président de la Commission de la Relève de la CAQ, en janvier 2017. C’est lui qui a dénoncé publiquement Claude Surprenant pour l’avoir rémunéré alors qu’il effectuait du travail partisan. Il est donc à l’origine de son expulsion du caucus de la CAQ.
Dans une lettre envoyée au Nord Info, de peur d’être mal cité, a-t-il indiqué, Yann Gobeil-Nadon affirme être resté plutôt discret ces derniers mois. Il souhaite aujourd’hui s’exprimer publiquement.
«Mon cynisme et mon amertume envers l’Assemblée nationale et la classe politique ont atteint un paroxysme», écrit d’abord Yann Gobeil-Nadon.
Revenant sur les événements qui ont mené le Commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale à mener une enquête sur les agissements de Claude Surprenant, M. Gobeil-Nadon ajoute que la raison pour laquelle il s’est lui-même dénoncé est simple: il espérait qu’un blâme du Commissaire permettrait à l’Assemblée nationale de sanctionner un député qui, affirme-t-il, «utilisait plusieurs subterfuges indignes à sa fonction».
«J’étais naïf, sans aucun doute, mais je me réjouis de ne pas être le seul à m’être aperçu que le député tentait d’induire l’Assemblée et ses institutions en erreur, comme le témoigne Jacques Saint-Laurent dans son rapport».
Ce rapport, auquel se réfère M. Gobeil-Nadon, est celui rendu le 30 novembre 2017, blâmant le député Claude Surprenant pour manquement au Code d’éthique de l’Assemblée nationale.
De simples excuses
Selon Yann Gobeil-Nadon, un élu politique qui enfreint les Lois de l’Assemblée nationale mérite davantage qu’un simple blâme.
«Déjà que le cynisme est à son comble, mentionne-t-il, on envoie le message que les députés sont au-dessus des lois. Il a été blâmé et a reçu une tape sur les doigts. Cette fois-ci, il fait une fausse accusation et la sanction recommandée est de présenter des excuses. Si un simple citoyen avait agi de la sorte, il aurait pu être accusé d’outrage au parlement ou de méfait public.»
Aux dires de M. Gobeil-Nadon, cela prouve que «l’imputabilité parlementaire se fait en toute impunité».
«Nos élus, les législateurs et les administrateurs de l’État, semblent pouvoir tout dire et tout faire sans réelle conséquence, comme s’il s’agissait d’un privilège parlementaire. À quand une véritable imputabilité?» se questionne-t-il souhaitant vivement voir des changements être apportés dans le futur.
«Je ne peux qu’espérer pour l’avenir que les parlementaires ne feront pas dans la facilité et défendront avec rigueur l’intégrité de l’Assemblée comme ils en ont prêté serment. J’attendrai avec impatience les jugements des différents tribunaux contre M. Surprenant qui est présentement poursuivi pour diffamation, pour harcèlement et pour congédiement sans cause et abusif.»