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Expropriation à Mirabel: Québec demande des excuses, mais Ottawa refuse

Le député de Matane-Matapédia et chef parlementaire du PQ, Pascal Bérubé.

Expropriation à Mirabel: Québec demande des excuses, mais Ottawa refuse

Publié le 04/04/2019

Une semaine après la commémoration des 50 ans de l’expropriation à Mirabel, les députés de l’Assemblée nationale ont adopté à l’unanimité une motion demandant, au nom des quelque 10 000 personnes ayant été expropriées de leurs terres, il y a 50 ans, à Mirabel, «des excuses officielles et formelles du gouvernement du Canada et un engagement ferme qu'une erreur historique d'une telle ampleur ne sera plus jamais commise».

Mais une motion semblable, que souhaitait déposer le député de la circonscription fédérale de Mirabel, Simon Marcil, n’a cependant pas obtenu dans les heures suivantes le consentement unanime des parlementaires de la Chambre des communes, à Ottawa, pour qu’elle soit débattue formellement et fasse l’objet d’un vote.

Il y a cinquante ans…

Rappelons que c’est le 27 mars 1969 que le gouvernement du Canada, alors dirigé par le chef libéral Pierre Elliot Trudeau, annonçait qu’il expropriait 97 000 acres de terre dans 14 municipalités sur la Rive-Nord en vue de la construction d’un aéroport international. Dès 1996, les vols internationaux étaient cependant transférés de Mirabel à Dorval, puis, en 2002, la décision de transférer tous les vols de passagers à Dorval était prise. En 2014, Aéroports de Montréal (ADM) décidait de démolir l’aérogare de Mirabel, devenue trop coûteuse à ses yeux à entretenir.

Quant aux 97 000 acres expropriées, 80 000 ont été rétrocédées en 1985 et 11 000 autres en 2006. Il reste cependant toujours 748 acres à restituer aux expropriées et à leurs descendants; le gouvernement du Canada mène actuellement des consultations à ce sujet avec les parties intéressées, selon les plus récentes informations.

Motion adoptée à Québec

Tout d’abord à l’Assemblée nationale, la motion en question a été déposée le mercredi 3 avril, en matinée, par le député de Matane-Matapédia et chef parlementaire du Parti québécois (PQ), Pascal Bérubé, qui a immédiatement, dans les minutes qui ont suivi, reçu le soutien de l’actuelle députée caquiste de Mirabel, Sylvie D’Amours, de la députée libérale de Notre-Dame-de-Grâce, Kathleen Weil, et de la députée solidaire de Sainte-Marie–Saint-Jacques, Manon Massé.

«Aujourd’hui, 50 ans plus tard, les familles expropriées et leur descendance demeurent profondément marquées par ces événements. Elles méritent de la considération, elles méritent que leurs dirigeants reconnaissent enfin le tort qui leur a été causé. À défaut de réparer, des excuses officielles viendraient mettre un baume sur une plaie qui peine à se refermer. Ce serait la moindre des choses enfin, ça et la rétrocession complète des terres une fois pour toutes», a déclaré M. Bérubé, lors de son intervention, en présence, dans les tribunes, de personnes expropriées et de l’ex-députée de Mirabel, Denise Beaudoin.

De son côté, Sylvie D’Amours, tout en tenant à saluer le travail de sa prédécesseure Denise Beaudoin, a tenu à souligner son appui comme députée de Mirabel, à ce que «sa famille ainsi que tous les citoyens qui ont été touchés, heurtés, brisés, obtiennent des excuses formelles et officielles de la part du gouvernement fédéral», tout en ajoutant au passage que «l’aéroport de Mirabel est une cicatrice dans le paysage agricole de la région».

Motion refusée à Ottawa

Également, du côté d’Ottawa, le Bloc québécois (BQ), par l’entremise du député de la circonscription fédérale de Mirabel, Simon Marcil, a tenté, le même jour, de déposer une motion demandant à ce que «le gouvernement présente formellement et officiellement des excuses aux citoyens et citoyennes du Québec qui ont été expropriés en 1969, par le fédéral, à l’occasion de la construction de l’aéroport de Mirabel»; mais celle-ci n’a pas reçu l’appui des députés libéraux.

«Cinquante ans plus tard, la moindre des choses serait qu’Ottawa s’excuse pour avoir cavalièrement bouleversé la vie de tous ces gens et défiguré une région agricole. C’est franchement insultant de constater que Justin Trudeau, qui n’en est pas à une excuse officielle près, a jugé qu’il pouvait se passer de celles-ci», a déclaré par après, dans un communiqué de presse, le chef bloquiste, Yves-François Blanchet.

Pour sa part, le député Simon Marcil est toujours d’avis que le premier ministre Justin Trudeau doit s’excuser aux familles au nom du gouvernement du Canada. «Ça ne réparera pas une erreur historique, mais 50 ans après avoir vu leurs maisons rasées par le gouvernement canadien, le moindre signe de considération serait le bienvenu pour les gens de la circonscription», d’indiquer celui-ci.

Il y a 15 ans…

Précisons, enfin, que l’adoption de cette motion à Québec (et le refus essuyé à Ottawa) survient presque 15 ans après que l’ex-députée de Denise Beaudoin ait présenté pareille motion au mois de novembre 2004.

Mais, à l’époque, la députation libérale, alors dirigée par Jean Charest, avait refusé la motion en question, une décision que Mme Beaudoin et le groupe d’expropriés qui l’accompagnaient avait qualifiée alors «d’insulte» à leur égard.

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