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Le Kid de Bum Rush

Autour du comédien Emmanuel Auger (Le Kid), on retrouve Constant Gagné (Shrink), Alain Nadro (Momo), Pat Lemaire (Papy) et Sylvain Beauchamp (Tank).

Le Kid de Bum Rush

Publié le 20/04/2011

Emmanuel Auger retrouvait Michel Jetté, auteur et réalisateur de Bum Rush, eux qui avaient déjà frayé dans le même monde pour le film Histoire de pen, et qui retrouveront assurément les fans de Hochelaga.

Bum Rush est un film très violent. Pas du type hollywoodien avec des courses qui se terminent à coups de poing dans la gueule sur un capot de voiture. Pas non plus une fiction pulpeuse à la Tarantino, mais plutôt d’une violence latente, haineuse, qui éclate sans sommation aucune.

Le plus cruel d’une scène de torture de prisonniers dans un atelier de soudure ne nous est pas vraiment montré, tout comme la turpitude du viol consenti dans un gang bang d’une pauvre fille que l’on intoxique toujours davantage pour mieux en abuser.

Ce ne sont pas tant ce que les scènes montrent en fait, mais plutôt cette violence dans le comportement des protagonistes, des non-acteurs pour la plupart, que le réalisateur est allé recruter dans la réalité du milieu, et jusque sur les sites pornos.

C’est le regretté rappeur Loosecanon qui a trouvé ces jeunes Noirs qui incarnent avec intensité le clash avec les motards et la mafia italienne, dans une guerre de territoire.

Avec Emmanuel Auger qui tient le rôle principal, celui du Kid, on retrouve aussi Paul Dion dans un rôle de policier à l’aube de la retraite, témoin des arrestations massives qui ont déstabilisé le milieu criminel et qui se fait narrateur, un peu comme ce motard en retrait qu’il incarnait dans Hochelaga.

Dans un conte sur la férocité humaine, il serait l’adjuvant, celui qui dicte la tâche qui incombe au héros.

Dans la grille de personnages de Jetté, il y a quatre ex-militaires qui bossent en sécurité et qui viendront épauler un compagnon d’armes dont le bar, le Kingdom, est l’épicentre de cette lutte de territoire tripartite.

La trame est solidement nourrie par la présence de Catherine (Dara Lowe, une véritable doorwoman), qui incarne une ancienne du gang I.B.11 vivant en probation dans une maison de transition. Mais ce sont surtout Loosecanon, un tueur impulsif, et Le Boss qui mènent le bal mortuaire dans une intrigue qui carbure à la testostérone, sinon à l’adrénaline.

«On n’a pas voulu insister là-dessus, mais le film a été tourné avec un budget de 60 000 $», nous confie Manu à propos de la production effectuée par Lise Sabourin et Michel Jetté, qui est lui-même allé sur le terrain rencontrer de véritables militaires devenus portiers, dont Pat Lemaire, afin d’étoffer son scénario. Ils sont trois à Montréal, semble-t-il.

On a cette même impression au sortir de Bum Rush qu’avec Histoire de pen, celle d’avoir été témoin d’une réalité. C’est une impression qui perdure bien après la représentation et qui laisse une empreinte forte dans l’esprit.

Il faut dire que le réalisateur implique le spectateur, le plaçant même dans la position du témoin silencieux, dans le regard inquisiteur du policier.

Le film n’est ni un jugement sur le milieu, ni une leçon de moralité. «On a même pensé à une suite», nous confiait le grand Manu, sans son œil de vitre avec lequel il a dû composer durant tout le tournage.

Il serait nécessaire d’aller plus profondément dans les communautés qui subissent ce climat harassant, cette négociation constante pour survivre dont les 190 minutes filmées par Jetté sont absolument saisissantes.