Sur la scène, dans la pénombre, une table et des chaises de bois, des chemises à carreaux et un habit de mineur, qui allaient servir à recréer différents lieux et personnages tout au long du spectacle. Déjà, on s’imprègne de cette atmosphère théâtrale et on a l’impression d’être ailleurs. Des voix d’hommes, les mineurs sans doute, résonnent dans l’espace. Puis, une lampe frontale s’allume et la conteuse entre en scène, boîte à lunch métallique à la main. Incarnant tour à tour son jeune fils Arthur et son propre rôle, elle lui raconte l’Abitibi, terre de ses origines, dans un dialogue empreint d’humour et de tendresse. Les mots sont précis et imagés, générateurs de rêves, pour nous faire comprendre, imaginer, plonger au cœur de la vie au «pays des géants».
Mais avant d’y arriver, on doit d’abord s’arrêter en Italie, «pays des mille tomates», où la conteuse fera la connaissance d’Antonio, ancien immigrant et mineur à Val-d’Or. Le vieux sage, à la fois touchant et fanfaron, lui racontera son histoire. Puis il l’investira d’une étrange mission qui l’emmènera à retourner en Abitibi, au cœur de ses racines, à la recherche du mystérieux Grand Zaphat… Les «hommes de pioche», c’est d’abord Ti-Cass, qui semble avoir élu domicile à la brasserie, mais qui se révèle une… mine de renseignements; c’est Paris Pâté et son amour dévorant pour sa Lucie; c’est Painchaud, avec sa jambe de bois et ses récits cocasses «parce qu’il y a pas juste des histoires tristes dans la mine»; c’est Le Gros Denis et ses cicatrices. Tous des hommes de cœur, des hommes de courage, des hommes intègres.
Ça grouille de vie et de mort dans la mine. C’est un univers exclusif et fascinant que Renée Robitaille nous fait imaginer sans peine, avec ses mots remplis de magie et même d’une certaine mystique lorsqu’elle prête sa voix aux différents acteurs de son récit. Car la conteuse ne fait pas que raconter, elle devient chacun des personnages, leur insufflant une vie propre avec mimiques, accents et postures à l’appui dans cette histoire aux mille ramifications. L’environnement sonore enveloppant et les effets lumineux dramatiques sont la cerise sur le gâteau, rendant encore plus réelles les vies dépeintes par Renée Robitaille. Si chaque boucle est toutefois bouclée, le récit gagnerait à être quelque peu resserré, histoire de garder le public entièrement captivé du début à la fin.