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Riccio à l’œuvre dans son atelier. Sur le mur, au fond, une série de tableaux privilégiant l’image symbolique et universelle du cœur. (Photo Claude Desjardins)

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Riccio tient désormais une galerie-atelier, au 1129, boulevard Labelle, à Blainville. (Photo Claude Desjardins)

Eternita: pour dire la mort autrement

Publié le 15/10/2018

Le peintre Blainvillois Riccio ne l’avait pas vue venir, celle-là. Engagé depuis 15 ans dans une production picturale reconnue, le voilà devenu bien malgré lui artiste funéraire, aux commandes d’une entreprise naissante qui a pour nom Eternita

La galerie-atelier qu’il vient d’inaugurer au 1229, boulevard Labelle, à Blainville, ne suffira bientôt plus à la tâche, pour tout dire, et l’artiste mesure à peine l’ampleur de ce qui l’attend, lui qui vient de faire breveter un procédé au moyen duquel les cendres funéraires sont intégrées à des œuvres peintes à la mémoire des disparus.

Tout cela remonte à une année, à peine, quand l’une de ses amies se trouvait inconsolable à la suite du décès de son père. «Je ne sais toujours pas pourquoi, je lui ai dit: apporte-moi ses cendres» , raconte l’artiste qui avait alors une vague idée de ce qu’il pourrait en faire et qui ajoute avoir été pour le moins estomaqué à la vue de ces cendres qui n’en étaient pas (disons les choses comme elles sont, il s’agit plutôt de poudre d’os), ce qui posait alors un problème épineux: impossible de les mêler à la peinture sans en altérer la couleur.

La nouvelle urne

Pour faire une histoire courte, l’artiste a finalement trouvé (inventé) une solution et a donc pu tenir sa promesse. Quelque temps après, son amie recevait un tableau créé à la mémoire de son père, les pinceaux avec lesquels il avait été réalisé, un certificat d’authenticité et une vidéo montrant Riccio à l’œuvre. «Quand j’ai livré la toile, mon amie était vraiment bouleversée. Il fallait la tenir pour ne pas qu’elle tombe» , raconte l’artiste à qui l’on a conseillé d’entreprendre rapidement les démarches juridiques visant à «protéger» son invention (NDLR: le peintre québécois Marc Séguin a initié une démarche similaire, en 2010).

Dans l’éventail somme toute limité de nos rites funéraires, voilà donc une nouvelle avenue pour quiconque souhaite exposer chez lui un objet qui lui rappelle un proche défunt, et Riccio, qui détient un brevet canadien sur l’ensemble du procédé (qu’on appelle Eternita, la nouvelle urne), est aussi en voie de le faire du côté américain.

Le reste tient dans un coup de fil passé, début avril, chez l’entreprise Magnus Poirier, dont le vice-président, Patrice Chavregros, après s’être d’abord montré intrigué, est vite devenu emballé. Depuis, Eternita est offerte à la clientèle parmi les produits usuels, et les commandes affluent.

Il faut savoir que la bannière Magnus Poirier n’a pas l’exclusivité de la «nouvelle urne» (on peut faire directement affaire avec Riccio) et que l’artiste peut adapter son style aux demandes de sa clientèle endeuillée. Ainsi, outre les cendres, on peut intégrer de petits objets ayant appartenu au défunt, ajouter du texte ou même une mèche de cheveux.

Un protocole respectueux

«Aucune toile n’est macabre» , ajoute Riccio qui précise, du même souffle, que les cendres elles-mêmes ne sont pas visibles, mais bien intégrées à un médium (l’acrylique) qu’il travaille à la spatule et au pinceau, sur une toile déposée bien à plat sur la table qui lui sert de chevalet. On peut suggérer une imagerie propre à la personne disparue et c’est le cœur qui revient le plus souvent, dans la forme symbolique et universelle qu’on lui connaît.

«Tout s’est passé très rapidement. J’ai commencé à faire ça chez moi, dans mon sous-sol. Maintenant qu’on est ici, je sais déjà qu’il me faudra éventuellement un endroit plus grand. Je suis dépassé par les événements» , résume le créateur de la «nouvelle urne» qui, suivant les conseils de son père, consent à céder ses toiles à un prix bien inférieur à celui du marché. «De toute façon, ce n’est pas une affaire d’argent. C’est une affaire de cœur, dans un protocole respectueux» , souffle Riccio.

À noter que vous pouvez voir de quoi il retourne en visitant le [http://riccioart.com]. Riccio tiendra également un kiosque au Salon de la mort, les 3 et 4 novembre, au Palais des Congrès de Montréal.