logo journal nord-info
icon journal
Les Chanteurs de Lorraine en concert: optez pour les caprices du chef

Les Chanteurs de Lorraine, sous la direction de Sandra Penner.

Les Chanteurs de Lorraine en concert: optez pour les caprices du chef

Publié le 10/06/2016

C’est ainsi que la chose nous était présentée, jeudi dernier au Centre culturel Laurent G.Belley, alors que la directrice musicale des Chanteurs de Lorraine, Sandra Penner, nous dévoilait le programme de la soirée, tel un chef déclinant son menu. Ce Vogage sans frontières auquel elle nous conviait prendrait donc tous les détours qu’elle voudrait.

Petite confession : la dernière fois que l’auteur de ces lignes assistait à un concert des Chanteurs de Lorraine, Sandra Penner prenait place parmi les choristes d’un ensemble qui comptait probablement la moitié moins de voix. C’était déjà un chœur intéressant, mais qu’est-ce qu’il a pris du galon depuis!

Les yeux au ciel

Vous devinerez qu’on ne s’est guère ennuyé tout au long de cette soirée (le concert faisait deux heures, entracte compris) pour le moins éclectique qui nous a fait voyager d’un continent et d’une époque à l’autre.

Dans ce buffet musical (restons dans la métaphore culinaire), il y avait Vivaldi, dont le Gloria nous amenait quelques extraits guillerets en apéro pour lancer une première partie dédiée à des chants sacrés. Très tôt, il était acquis que la soprano Claudia Giuliani serait résolument de la fête (quand on a une telle voix sous la main…), elle qui se signalait à plusieurs reprises, notamment dans un très solide duo avec Sandra Penner elle-même (Laudamus te, extrait du Gloria).

On visiterait ensuite des zones plus graves, profondes et  méditatives, avec les Fauré (Libera Me, extrait de son Requiem), Duruflé (Ubi Caritas), Jenkins (Agnus Dei), Helvey (O Lux Beatissima), jusqu’à atteindre un sommet vertigineux avec Mozart (le Lacrymosa tiré du Requiem, que le chœur a rendu dans une sorte d’état de grâce), à classer au rayon des coups de cœur de cette première partie, au même titre que ce Dal tuo stellato soglio, chant de lamentation impliquant Moïse (et surtout un quatuor de solistes composé de Mme Giuliani, Nancy Larocque, Andrea Alacchi et Sean Penner), coincé avec le peuple d’Israël entre la Mer Rouge et l’armée du Pharaon. Très beau et prenant.

Les pieds sur terre

Cette première partie s’achevait sur une note plus animée, avec Wade in the Water, un chant issu du répertoire negro spiritual, fait d’envolées éclatantes, mais non dépourvues de gravité, et qui faisait convenablement le pont vers la deuxième partie qui délaissait les considérations divines pour des aspirations beaucoup plus terrestres : l’amour, la séduction, les plaisirs épicuriens, le pacifisme, l’émancipation.

Diane Tell (une Gilberto joliment chantée par Nancy Larocque) y côtoyait Verdi (La Traviata) aussi bien que Bizet (Carmen) ou Mozart (Don Giovanni), jusqu’à Catalini, dont le chant désespéré de La Wally (Ebben? Ne Andro Lantano), qui peut nous apparaître comme une véritable prouesse vocale, a été rendu avec une belle intensité par Claudia Giuliani.

Édith Piaf s’y pointait le cœur et l’âme, avec Non, je ne regrette rien, une autre jolie pièce de ce menu éclectique de Mme Penner qui semble aimer tout ce qui est pur et beau et qui fait la part belle à des œuvres qui, bien que «populaires», n’en contiennent pas moins le génie des artistes de notre temps. Ainsi, les arrangements choraux du Doux chagrin, de Gilles Vigneault, et de Quand les hommes vivront d’amour, de Raymond Lévesque, auront constitué deux moments très forts de ce concert qui achevait de nous émouvoir avec la berçante Fare Thee Well, Love de James Rankin et We Rise Again, de Leon Dubinsky, un chant de ralliement, en hommage aux victimes du Kosovo, dont le refrain entraînant nous raccompagnait jusqu’à la maison.

C’est le cadeau que les Chanteurs de Lorraine feront aux Français, aux Suisses et aux Italiens, dans le cadre d’une tournée qui aura lieu en juillet prochain, avant de préparer le concert de Noël des 15 et 17 décembre, duquel Jean-Sébastien Bach sera le compositeur attitré.